avril, 2019
03avril14h0016h00Archives et droits humainsSession présidée par Agnès DEJOB14h00 - 16h00
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Le cas de l'Ofpra, le défi de l'ouverture d'archives protégées Par Aline ANGOUSTURES et Adélaïde CHOISNET, Office français de protection des réfugiés et apatrides La Mission histoire et valorisation des
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Le cas de l’Ofpra, le défi de l’ouverture d’archives protégées
Par Aline ANGOUSTURES et Adélaïde CHOISNET, Office français de protection des réfugiés et apatrides
La Mission histoire et valorisation des archives de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) propose un retour d’expérience sur la mise en place de l’accès à des fonds d’archives restés fermés pendant de longues années. En effet, établissement public chargé en toute indépendance de l’application de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, créé par la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952, l’Ofpra s’est longtemps appuyé sur un article de cette même loi pour refuser tout accès à ses archives.
Ce retour d’expérience se fera à deux voix, en s’appuyant sur l’expérience de la créatrice et actuelle cheffe de la mission, et sur le point de vue de l’archiviste chargée du classement des fonds administratifs. Le cas des archives de l’Ofpra permet d’aborder différents défis pour les archivistes en matière de transparence, d’accès aux fonds et d’innovations.
D’abord, il sera nécessaire d’expliquer comment l’enchainement de la création d’une institution conçue comme un « consulat des réfugiés » (Karen Akoka, 2017), et de décisions jurisprudentielles et européennes sur la protection des demandeurs d’asile a conduit à voir ces archives comme « interdites » (Sonia Combe, 1994). Sera ensuite abordée la question de la communication de ces archives en retraçant les grandes étapes de la création du service dédié, en montrant quelles ignorances et quelles méfiances substituent en dépit de cette nouvelle volonté de transparence, et quelles limites sont posées par les archives elles-mêmes, documents « à protéger » en raison de leur valeur juridique et légale, géopolitique et patrimoniale. On mettra enfin en parallèle les évolutions de la notion de protection des données et des techniques de valorisation des archives, notamment sur Internet, pour exposer comment la Mission histoire a réussi à concilier, grâce à un nouveau portail d’archives en ligne, les exigences de protection de la vie privée et les attentes des nombreux lecteurs et généalogistes, pour offrir une première porte d’entrée dans ses fonds.
Retracer le passé de victimes de la société: la gestion de l’impact émotionnel sur les archivistes
Par Anouk DUNANT GONZENBACH et Pierre FLUCKIGER, Archives d’État de Genève
Jusqu’au début des années 1980 en Suisse, des mesures de coercition à des fins d’assistance et de placements extrafamiliaux ont été prises à l’encontre d’enfants et de jeunes. Ces enfants ont été très souvent maltraités dans les institutions ou familles d’accueil dans lesquelles ils ont été placés. Depuis quelques années, nous avons assisté à une prise de conscience de l’opinion publique, qui a amené le Parlement à adopter en 2016 une loi qui prévoit entre autres que les victimes de ces placements puissent bénéficier d’une contribution de solidarité. Cette loi donne pour mission aux archives cantonales de reconstituer les parcours individuels de ces personnes afin de fournir les preuves de ces placements.
Les archivistes se retrouvent ainsi en contact avec des personnes qui ont été placées dans leur enfance et qui cherchent à combler les trous de leurs passé; ils effectuent les recherches permettant d’étayer les dossiers de demandes d’indemnité. Ils sont ainsi confrontés très régulièrement à des situations émotionnelles particulièrement impactantes, qui peuvent, parce qu’elles sont très fréquentes, déclencher des symptômes post-traumatiques.
Le métier d’archiviste ne forme pas à la gestion de ces situations particulières. Ce retour d’expérience présentera comment il est possible de développer des compétences qui aident à préserver la santé à court et moyen terme des archivistes confrontés à ces situations et comment à l’avenir notre profession peut et doit s’y préparer.
Intensifier un conflit en détruisant des archives : le cas de la Commission de vérité et réconciliation du Canada
Par Jennifer DEKKER, University of Ottawa
Les commissions de vérité sont le plus souvent établies dans des pays qui connaissent depuis longtemps des violations des droits de la personne. Il est extrêmement rare d’établir une commission de vérité dans une démocratie libérale telle que le Canada. Pourtant, le Canada a mis sur pied une commission de vérité et réconciliation en 2008 pour régler une poursuite collective importante de la part des anciens élèves des pensionnats autochtones. Les victimes ont allégué de multiples formes de violence physique et psychologique au cours des 150 années de fonctionnement de ces établissements.
Bien qu’il existe des milliers de documents textuels et photographiques dans le nouveau Centre national pour la vérité et la réconciliation (voir https://nctr.ca/fr/map.php), ils représentent en grande partie le point de vue de l’État en ce qui a trait aux événements survenus pendant l’époque d’assimilation d’enfants autochtones. Les conséquences des pensionnats sur les peuples autochtones sont beaucoup moins bien documentées. Cependant, en octobre 2017, la Cour suprême du Canada a tranché en faveur de la destruction d’une collection d’archives (recueillies dans le cadre du Processus d’évaluation indépendant) détaillant les agressions les plus atroces subies par les jeunes pensionnaires.
Cette conférence portera sur la Commission de vérité et réconciliation et analysera les effets de la décision de la Cour suprême du Canada. Je comparerai cette décision à la loi allemande sur les archives de la Stasi, qui abordait les mêmes défis, mais de manière très différente. Je toucherai également sur les questions concernant les conséquences probables de la destruction des archives, de ce qui aurait pu être fait différemment, et de la manière dont les communautés de victimes ont été divisées par cette décision.
Une communauté d’ego-consultants : des usagers à la recherche de leurs dossiers d’enfant placé
Par Adélaïde LALOUX, Université d’Angers
Cette proposition découle du travail de doctorat en cours qui étudie les dossiers individuels en protection de l’enfance, sur l’ensemble de leur cycle de vie et dans plusieurs domaines de production, que ce soit dans la sphère judiciaire, administrative ou associative, de la fin des années 1970 à nos jours. Lors de cette étude, nous avons identifié une « communauté d’égo-consultants » comme un concept applicable aux dossiers établis dans le cadre de la protection de l’enfance. Cette idée découle directement de la notion « d’égo-archives ». C’est un système au sein duquel les usagers partagent un vécu similaire qui a engendré la création d’archives les concernant. Tels que nous les envisageons, les membres sont liés par une fragilité commune qui les amène, à travers la consultation, à des pratiques identitaires comparables. Une volonté d’entraide s’organise face au monde des archives : les usagers se regroupent, par le biais d’internet ou d’associations, pour se questionner et avancer ensemble dans leurs démarches. Ce système permet alors d’envisager la lecture du dossier, à l’encontre des représentations spontanées, comme un acte social et non comme une activité purement individuelle. Par ailleurs, cette communauté souhaite optimiser la puissance de réparation des archives. Ainsi, la volonté de pouvoir modifier eux-mêmes le contenu du dossier permet aux usagers d’investir et de mettre en évidence la puissance symbolique et identitaire des archives. Finalement, au-delà d’une valeur historique ou administrative, la valeur personnelle se trouve au centre de l’attention. C’est pourquoi de nouvelles logiques d’usage se dégagent et sont à prendre en considération dans le déroulement du traitement archivistique. La question du rôle de l’archiviste se pose. De notre point de vue, c’est bien la liberté que prend l’État d’intervenir dans la vie familiale des personnes concernées qui induit une obligation certaine de rendre les briques d’une histoire personnelle complexe aussi compréhensible et transparente que possible pour l’usager, tout en sachant le protéger.
Horaire
(Mercredi) 14h00 - 16h00
Lieu
Salon Passementiers
Centre de congrès - 23 rue Ponchardier - 42000 Saint Etienne
Intervenant pour cet événement
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Adélaïde CHOISNET
Adélaïde CHOISNET
Office français de protection des réfugiés et apatrides
Adélaïde Choisnet, archiviste, est diplômée du master professionnel de l'Université d'Angers en 2015 et travaille à la Mission histoire et valorisation des archives de l'Ofpra depuis juillet 2016
Office français de protection des réfugiés et apatrides
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Adélaïde LALOUX
Adélaïde LALOUX
Université d\\\'Angers
Adelaïde Laloux est doctorante en archivistique à l'université d'Angers dans le cadre du programme de recherche EnJeu[x] (Enfance-jeunesse). Son sujet de thèse porte sur le dossier individuel en protection de l'enfance : "Le dossier personnel de l'enfant dans le secteur sanitaire et social : constitution, conservation, accès.". Elle a également accompli plusieurs missions comme archiviste en collectivités territoriales et comme ingénieure d'études, notamment dans le cadre d'une analyse des pratiques des internautes généalogistes.
Université d\\\'Angers
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Agnès DEJOB
Agnès DEJOB
Membre du comité scientifique du 3e Forum des archivistes
Spécialités : pratique du métier d’archiviste dans les Archives régionales, archives du milieu militant, archives et citoyenneté, insertion professionnelle et référentiels métiers dans les archives. Parcours professionnel : diplômée en archivistique ; responsable des Archives régionales de la Région Pays de la Loire (depuis 1998). Parcours associatif : Conseil, classement et valorisation d’archives du monde associatif nantais et national. Adhérente et impliquée sur de nombreux projets dans plusieurs associations professionnelles d’archivistes : Collectif A8 (de 2003 à 2010), Association des archivistes français (depuis 2004 ; j’ai notamment été secrétaire et chef de projet référentiel métiers) ; Conseil international des archives (chef du projet Modèle de compétences pour les archives de 2009 à 2011).
Membre du comité scientifique du 3e Forum des archivistes
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Aline ANGOUSTURES
Aline ANGOUSTURES
Office français de protection des réfugiés et apatrides
Aline Angoustures, historienne, est cheffe de la Mission histoire et valorisation des archives de l'Ofpra. Elle a co-dirigé récemment l'ouvrage "Réfugiés et apatrides. Administrer l'asile en France (1920-1960), PUR, juin 2017.
Office français de protection des réfugiés et apatrides
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Anouk DUNANT GONZENBACH
Anouk DUNANT GONZENBACH
Archives d’État de Genève
Anouk Dunant Gonzenbach est directrice adjointe des Archives d’Etat de Genève depuis 2017 ; elle y travaille depuis 2002. Elle est notamment responsable des projets numériques : archivage électronique; gouvernance des documents et données électroniques; outils numériques et médiation numérique. Elle est membre du groupe Records Management de l'Association des archivistes suisses. Elle tient un blog professionnel « le présent d’hier et de demain »: www.hieretdemain.ch
Archives d’État de Genève
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Jennifer DEKKER
Jennifer DEKKER
University of Ottawa
ANGLAIS: I am an academic librarian whose current research interest is political agency through archives. For the last several years, I have been focused on the Indian Residential School archives collected by the Truth and Reconciliation Commission in Canada. FRANCAIS: Je suis une bibliothécaire académique, et je m'intéresse actuellement à l’affirmation politique à travers les archives. Au cours des dernières années, je me suis concentrée sur les archives des pensionnats autochtones recueillies par la Commission de Vérité et Réconciliation au Canada.
University of Ottawa
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Pierre FLUCKIGER
Pierre FLUCKIGER
archiviste d\\\'Etat (Genève)
archiviste d\\\'Etat (Genève)
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